Participants : Henri, Laurent
TPES : 4H
Difficile de résister à la tentation d'aller observer lorsqu'une crue de reprise de cycle se produit sur un massif en cours d'investigation.
C'était le cas cet après midi dans la haute vallée de l'Aude après que plus de 120mm soient tombés.
Je récupère Henri à Couiza et nous montons sur le plateau voir les pertes dans un premier temps. Les terrains sont saturés et bon nombre de dolines sont pleines d'eau.
Visite à la perte du Rébounédou qui sature elle aussi. La doline est transformée en un grand lac.
Un peu en amont de la zone saturée, on peut se rendre compte du débit qui rentre dans le massif à cet endroit, environ 2m3/sec.
Ensuite direction la perte des Bouychettes, qui a disparu sous les flots. Le ruisseau roule plusieurs centaines de litres par seconde, dépasse la perte habituelle, traverse la route et file se perdre au nord dans un îlot rocheux emergeant des alluvions.
Nous descendons ensuite vers l'Escale, garons le voiture au col du Chandelier et allons voir l'entrée du trou du même nom où nous étions dimanche dernier.
Et là, surprise....le courant d'air s'est totalement arrêté. Dans le fond de la vallée un roulement de tambour permanent annonce que le Blau fait une "percée"de grande ampleur. Le lien de cause à effet est vite établi : le Chandelier est, comme le trou du Vent, en relation avec la zone noyée temporaire du Blau. Cela aura des conséquences sur les explos futures...
Petit détour par le trou du Vent où de vent il n'y a plus...à peine un léger souffle d'air chassé des vides karstiques par l'eau qui monte plus bas dans les galeries.
La visite de la résurgence du Blau est le clou du spectacle : le porche inférieur est totalement plein et crache plus de 4m3/sec. Dans le porche supérieur, l'eau est à moins d'un mètre du rebord et coule à travers les éboulis pour grossir le débit. On peut observer l'eau qui monte à vue d'oeil, environ 1cm par minute : le pic de crue n'est pas encore atteint.
L'eau qui vient du porche inférieur à gauche rencontre celle du porche supérieur à droite de la photo |
On descend le cours d'eau jusqu'à la station de mesure installée pour les besoins de l'étude. Le gué est infranchissable en voiture, le seuil de mesure est sous l'eau. L'estimation du débit global du système est difficile à vue d'oeil mais vraisemblablement supérieur à 6m3/sec. Les données vont être très intéressantes à analyser puisque nous étions en étiage sévère 48h auparavant.
Le gué du Sourd |
La station de mesure presque submergée |
Enfin, à la tombée de la nuit, visite au retour de la source de Ginoles où la station de mesure est elle aussi sous l'eau malgré un débit moindre que celui du Blau vraiment impressionnant.
Dernier point d'arrêt à Font Maure où l'eau sort dans la partie supérieure du porche.
Tournée une nouvelle fois très enrichissante sur le plan des observations inédites, et qui fait fonctionner la reflexion à plein régime.
5 commentaires:
Magnifique tout ça !!
Laurent, comment ce fait-il que le Chandelier se comporte en entrée basse, et soit en relation avec le Blau qui est situé 150 m plus bas ?
(ou alors j'ai pas tout compris)
JPP....les deux trous sont des entées basses...liées à des trous que nous ne connaissons pas encore sur le plateau.Mes les deux semblent aller vers un réseau semi-actif qui s'amorce après des intempéries...
A confirmer dans quelques jours pour le chandelier, ou il ne s'agit peut étre que d'une vasque qui ce désamorce plus vite (j'ai des doutes!)
Cela ne fait aucun doute,conformément à mes observations sur le comportement de la faille Parkinson.Cela veut aussi dire que l’entrée du Blau ne devait pas cacher son courant d'air violent qui sort en temps normal. suivant ce que donnera le trou du chandelier, il faudra absolument poursuivre l'escalade à l’intérieur
...
Voilà comment je vois les choses pour le moment :
La source du Blau est un surcreusement récent d'un drain plus ancien aboutissant dans le secteur du Chandelier. Le trou du Vent n'est qu'un regard sur cette capture récente, mais est aussi en relation avec l'ancien drain supérieur par une multitude de diaclases étroites remontantes (la zone est située sur le front nord-pyrénéen et est intensément fracturée). Le Chandelier devrait doubler le trou du Vent par au dessus puis rejoindre la diffluence plus en amont dans des conduits plus vastes que ceux du trou du Vent, mais dont les parties basses se situent encore dans la zone de battement actuelle, d'où le verrouillage du courant d'air en crue.
Les conduits en montagnes russes typique du drainage de ce genre de karst peuvent en effet présenter de grandes dénivellations entre les parties hautes et basses du drain, de l'ordre souvent d'une soixantaine de mètres, comme c'est le cas sous la forêt des Fanges ou sous le Mouthoumet.
A la source du Blau, le courant d'air est bloqué en été par les siphons résiduels. Il s'echappe donc par le trou du Vent 100m au dessus, et maintenant aussi en partie par le Chandelier. Car la pression motrice potentielle est énorme : il peut exister des dizaines d'entrées hautes sur une surface gigantesque (50 km2), à des altitudes pouvant atteindre 500m de plus que celle du Chandelier. Tous ces courants d'airs n'ont qu'une seule option : converger vers le seul échappatoire potentiel de la partie centrale du plateau de Sault, à savoir les orifices de la reculée du Blau qui sont l'aboutissement de l'entonnoir à Vent.
Conclusion de tout ça, je penche donc pour une reprise rapide du courant d'air au Chandelier une fois la crue terminée.
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