dimanche 10 novembre 2013

Sauvetage de la chienne Miki


Le 6 et 7 et un peu du 8 novembre 2013
Participants du SCA : Alain M. JPP et l'équipe de chasse de Villeneuve
TPST : 10h30
             Ce mercredi 6 novembre, au cours d’une banale journée de chasse, un drame se joue. Une petite chienne de race Jag Terrier a disparu subitement des écrans radars du GPS. Cet instrument spécialisé est destiné à localiser les chiens de chasse et les ramener plus facilement au bercail le soir venu. Sa course derrière un renard, tracé sur la carte IGN, cesse brusquement par manque de contact satellite. La nuit arrive, et nous nous mettons à la recherche de la cavité dans laquelle a dû se glisser la petite bête. La précision de l’appareil est telle que nous localisons sans mal l’entrée du terrier. Là, des grognements lointains confirment bien sa présence. Mais le problème est l’étroitesse de la galerie et la dureté de la roche. Le trou est situé dans les calcaires bleus de l’ère primaire, un kilomètre au nord de Villeneuve Minervois, en bordure de la rivière « La Clamoux ». La nuit arrive et nous décidons de remettre au lendemain une quelconque investigation. Nous espérons aussi la sortie de Miki lorsqu’elle aura calmé ses ardeurs contre ce malin renard.
           Dédé et Christine, les propriétaires de la chienne sont dans un état déplorable. Il faut dire que la petite Jag, au demeurant excellente à la chasse, est plutôt du genre canapé et partage parfois leur lit. Ils vont scruter inlassablement l’écran du GPS qui reste désespérément muet. Le lendemain à quatorze heures, nous décidons d’intervenir. Une grande partie de l’équipe de chasse s’est mobilisée. Le terrain est défriché et nous nous mettons à creuser pour essayer d’élargir cette entrée, juste de la taille d’une tête. Heureusement, le sol couvert de terre permet de descendre de manière conséquente. Mais la roche se rétrécit et freine la progression. Le recours à l’explosif devient obligatoire. Je téléphone à Alain qui est au travail. En véritable chef d’équipe, il donne le ton et les directives. Je laisse les compagnons chasseurs continuer le travail et je pars chercher les fournitures nécessaires.
          A mon retour, à ma grande surprise, ils ont réussi à agrandir un peu plus le passage. Je pense alors à Etienne qui est en ce moment loin d’ici. Je rêve de sa souplesse pour se faufiler dans les étroitures. Je m’engage quand même dans cette galerie remontante sur cinq mètres qui s’élargit un petit peu. Puis, trois mètres plus loin, en contrebas, un grand cris de joie s’échappe de ma poitrine et se répercute jusqu’à l’extérieur : la chienne est là. Sa tête émerge d’un petit trou et semble me supplier de la délivrer de sa prison de roche. Une étroiture située dans un  point bas a dû se combler après son passage. Malheureusement, la partie restante pour l’atteindre est trop étroite. Une grande lame de trente centimètres d’épaisseur barre le passage. Il faut faire parler la poudre.
           Entre temps, les chasseurs ont amené  un groupe électrogène. Alain vient d’arriver et tout le matériel pour la désobstruction est prêt. Nous avons mis une grosse couverture devant la chatière pour protéger la chienne. Deux tirs de faible puissance sont d’abord effectués pour aménager le passage des seaux. A l’extérieur, la nuit a couvert depuis longtemps les lieux. Dédé et Christine sont là avec tous les chasseurs. La détonation est raisonnable. Personne ne bronche. Le tir suivant destiné à exploser la lame est fracassant. Malgré les paroles rassurantes d’Alain sur le sort de Miki, le groupe blêmit. Une deuxième charge aussi impressionnante achève l’assemblée qui ne se fait plus aucun doute sur la survie de notre chienne après une telle déflagration. Mais Alain, imperturbable, est sûr de son coup.
           L’heure tourne. Nous n’avons pas pris de repas et la fatigue commence à se faire sentir. Le va et viens incessant que nous effectuons avec Alain dans cette longue étroiture est épuisant. La chaleur qui règne en haut de la cloche est très éprouvante. Nous ressortons chaque fois exsangue. Nous enlevons les couvertures pour aérer un peu et la chienne ressort sa tête. Ses pleurs nous fendent le cœur et nous interdisent tout repos. Parfois, comprenant notre manège, elle gratte le sol ou saisit un cailloux dans sa gueule pour nous encourager. Puis épuisée, elle ferme les yeux, bercée par le son du burineur.
           Il ne reste que quatre vingt centimètres pour l’atteindre. Il est prés de minuit. Voilà dix heures que nous bataillons sans arrêt. Je commence à me décourager mais Alain ne faiblit pas. Il remonte faire un dernier tir. Celui-ci a bien travaillé et me permet de m’approcher un peu plus. Hélas, la chienne apeurée a disparue. J’en profite pour nettoyer le sol de l’étroiture. Les poignées de cailloux sont remontées à l’énergie, pour ne pas dire à l’agonie. Le trou en contrebas est monté couché, à reculons. Je suis au bord de l’épuisement. mais surtout exaspéré car la chienne ne réapparaît pas.
          Dédé entre alors en scène et ses puissants appels portent enfin leurs fruits. Miki sort maintenant la moitié du corps et se met à hurler. L’instant est tragique. Je suis impuissant car lorsque j’essaye de la cramponner, elle me montre les dents et fait mine de me mordre. Désespéré, je sors du trou. Alain enfile un énorme gant scotché avec la veste. Il a l’intention de l’extraire de force. Tout à coup, un bruit bizarre se fait entendre. C’est le genre de bruit tout à fait anodin que fait un chien lorsqu’il s’ébroue de la tête à la queue. Jamais un tel bruit ne m’avait procuré autant de plaisir. Je viens de comprendre que l’animal vient de s’extraire de la faille. Alors là, je ne vous raconte pas les cris de joie et les pleurs. La vedette bien involontaire de cette journée semble défiler, toute fière  dans la haie d’honneur formée à sa sortie.
           Mais cette sacré Miki nous aura fait passer de biens mauvais moments et nous espérons que l’expérience restera gravée dans sa mémoire pour éviter à l’avenir de tels désagréments.

                  Une partie de l'équipe des sauveteurs et la chienne Miki dans les bras d'Alain

5 commentaires:

riton a dit…

Un vrai roman de la bibliothèque rose...votre histoire!!
Qui s'étèlle a son écriture pour les archives du Club?
Après ça,Jean Pierre...j'espère que l'on va recevoir une petite subvention de ta société de chasse!
Je crois que ça fait deux années de suite,que vous réussisez pareille opération!

Jean Michel a dit…

Encore une aventure extraordinaire de la brigade canine du SCA.

Nous allons pouvoir demander des émoluments à la richissime fédération de chasse et à la fondation Brigitte Bardot.

Quand la saison sera terminée, j’espère que tu amèneras tous les chasseurs aux désob!

Il faudrait faire passer des tests à l'animal pour savoir comment il a supporté les gaz, la déflagration etc... Une dissection serait utile.

Cédric BRIFFON cedric@briffon.fr a dit…

Bonjour,
la dépêche a également relaté l'événement :
http://www.ladepeche.fr/article/2013/11/11/1750338-corbieres-il-decouvre-une-grotte-exceptionnelle.html#xtor=EPR-1

Cédric BRIFFON

JPP a dit…

Jean Michel, rassure toi, le proprio a amené la chienne chez le véto le lendemain. Il n'a rien trouvé d'anormal, y compris au niveau des tympans qui ont été soumis à rude épreuve. Un grand coup de chapeau à Alain qui s'est comporté en véritable pro. Ce n'était pas évident.

masdan a dit…

Tes textes sont dignes de Pagnol, à compiler et conserver, félicitation à l'équipe : J'aime les ''happy end'' (y)