Laurent en solo
TPES : 5H
Ca faisait plusieurs années que ce n'était pas arrivé sur le secteur : une grosse crue hivernale que l'on doit à un front chaud stagnant plus de 36h (car bloqué dans sa progression par l'air froid présent sur l'est européen) et continuellement rabattu sur le relief pyrénéen, doublé d'un état de saturation préalable du karst.
Une combinaison explosive pour cette zone au climat océanico-montagnard, et une occasion de relevés et d'observations à ne pas manquer.
Début de la tournée par la station hydro du Blau au niveau du gué du Sourd et premiers constats :
Le Blau est sorti de son lit en amont de la station et malgré cela la station est entièrement sous l'eau, du jamais vu depuis l'installation !
Le chemin d'accès au gué est sous l'eau |
Le gué du Sourd |
La station de mesures, accrochée à l'arbre, est noyée. Le seuil n'est plus visible non plus |
Diffluence du cours du Blau vers les champs et le chemin |
Le ton est donné; le débit du Blau est énorme, probablement supérieur à 10m3/sec sans trop prendre de risques sur l'évaluation.
Montée impatiente vers la résurgence. Pas déçu du spectacle...
Sous les porches d'entrée. No comment... |
Le porche le plus haut est plein lui aussi et déborde |
Vue depuis le porche principal (totalement saturé) vers l'aval |
J'ai le sentiment d'être arrivé au bon moment pour observer le pic de crue : il n'y a aucun signe d'amorce de décrue sur les berges.
En descendant le cours du torrent, en rive gauche, je tombe sur une grosse sortie d'eau inconnue dans un éboulis au dessus de la rivière.
Sortie d'eau mystère |
Mais bien sûr... Je suis juste à l'aplomb de la galerie du Chandelier...qui ne doit plus être fossile en ce moment ! Cette source bien planquée ne doit couler que quelques heures tous les 5 ans environ...sacré coup de bol.
Du coup, montée vers l'entrée du Chandelier pour confirmer ce fort pressentiment; et là, nouvelle surprise : malgré le froid et la neige au sol, le trou souffle !
Cette fois ça siphonne bien et pour de bon plus bas, et la montée des eaux dans le karst expulse l'air de la galerie ! Exceptionnel...
Le prochain objectif de la tournée est le trop-plein des Graviers. En effet, le but aujourd'hui est d'échantillonner un maximum de sources et pertes majeures pendant la pointe de crue pour faire en laboratoire un "instantané" crue plateau de Sault en géochimie, ce qui manque cruellement à ce jour. Nul doute que ce décryptage apportera de nouvelles et intéressantes informations sur de possibles correspondances...
Bref, descente par le sentier du maquis qui a les pieds dans l'eau au niveau de la vallée qui déborde là aussi.
Ambiance sur le sentier |
Cours du Blau majestueux en sous bois |
Confluence Graviers-Blau |
Le trop-plein des Graviers vu du bas |
Et vu depuis le sentier... |
Après ce tour d'horizon dans la vallée, départ vers le plateau où le paysage change radicalement.
Les dolines de la vallée suspendue sont pleines d'eau et sous la neige |
Certaines débordent vers des pertes situées plus en aval |
Au loin, les crêtes du Madres subissent une tempête de glace |
Belle crue là aussi |
Fin du circuit par la source de Ginoles, dont le débit est anecdotique en comparaison des autres observations de la journée, puis bien sûr par Font Maure, dont la confluence avec l'Aude est spectaculaire...
Au niveau hydro après cette tournée, la plus grosse surprise vient du très fort débit du Blau qui semble comparable à celui de Fontestorbes et même supérieur à celui de Font Maure pour cette crue. Ceci contredit les conclusions présentées lors de la dernière réunion du comité de pilotage du projet "Sault". Il semble que le comportement des différents exutoires varie selon l'intensité et le type de crue. Nous n'aurons malheureusement pas de valeurs à comparer car la station du Blau est inexploitable. Il y a encore du pain sur la planche pour tout comprendre. Espérons que la géochimie de cette crue nous aide un peu.
Au niveau spéléo, le fonctionnement du Chandelier se précise. La perspective de pouvoir contempler des débits de cet ordre de grandeur prochainement sous terre est tout simplement terrifiante et fascinante à la fois. Une leçon d'humilité donnée par la Nature...
11 commentaires:
Énorme ! C'est pas de la petite tuyauterie sous le Blau ! Tu pourrais te mouiller un peu plus concernant les débits du Blau, je dirais presque le double, bon d'accord moi j'exagère peut-être un peu puis je l'ai pas vu en vrai !
En fait c'est très difficile de faire une estimation correcte de tels débits.
Mais si je devais parier je dirais 15...
Je suis inquiet pour la station! Je me demande si elle est encore là!
Boris et Thibault sont passés il y a quelques jours, et la crue était déjà en cours. Ils ne voyaient déjà plus le seuil, et n'ont pu faire de jaugeage à l'ADCP, car il n'était déjà pas possible de traverser.
Fab
T'as quand même un vase incroyable laurent! Car la dernière crue date de 2016 juste après l'installation de la sonde, il restait 20cm du tube de la station, et la photo était de toi...
Le must aurait été d'étre dans...le trou du vent et le Chandelier!
Quand l'on retourneras dans ce dernier, il devrais rester des traces de cette crue.
Laurent, comme explique tu la ventilation avec ces hauteurs d'eaux!?
Reportage fabuleux et quel engagement de ta part!
Henri, lors des "percées" de moindre ampleur du Blau cette année, la ventilation normale au Chandelier est toujours restée présente. Cette fois, c'est différent : la boîte aux lettres doit siphonner totalement car alimentée par un cours d'eau, ce qui doit être rare.
Les lacs en aval devaient être en cours de remplissage rapide, du coup l'eau a pris la place de l'air qui était chassé de la cavité par l'entrée, d'où le courant d'air soufflant "chaud". Ca n'a probablement duré que quelques heures à peine.
tres impressionnant,cela montre reellement l importance du systeme
Normalement ce n'est pas important...mais énormissime!
En hommage à notre cher "Pick"qui viens de nous quitter, il faudra songer à baptiser une belle salle, ou un réseau à son Nom.
Sympa reportage que tu nous a fait,l'ambiance sur place devait être terrible!t'as pris le temps de faire le tour complet de la zone et c'est très bien car nous avons maintenant des informations inédites qui confirment que le chandelier c'est du très lourd!!grand moment à vivre car les pointes de crues au blau restent très brèves....
Oui très brèves en effet par rapport à Fontestorbes ou Font Maure. C'est pour ça qu'elles n'ont jamais pu être quantifiées, et cela fausse la reflexion globale sur le fonctionnement hydrogéologique du plateau.
Cette fois on a plus de "billes". Voir post à venir avec photos comparatives.
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