participants : Henri, Laurent, Alexandre, Léa
TPES : 5h
Un petit tour d'horizon de l'effet de l'épisode pluviométrique hors du commun que nous venons de vivre sur nos chers massifs calcaires locaux.
Nous nous retrouvons avec Henri à 10h devant l'emergence karstique visuellement la plus spectaculaire du secteur : Vignevieille avec sa cascade de 50m de hauteur sortant de la montagne
Le débit, très puissant, se compte en m3/sec mais très difficilement estimable, comparable à celui de la crue d'Octobre dernier (de niveau quinquenal). La différence provient de la durée de la percée bien supérieure à la normale et qui est loin d'être terminée. La morphologie des zones d'ensablement (siphons) dans le réseau va être fondamentalement modifiée, notament dans la zone de l'affluent des Tibétains qui sera à revoir à la prochaine incursion.
Voir autant d'eau sortir ramène instinctivement à imaginer la suite de ce collecteur que nous n'avons fait qu'entrevoir quelques dizaines de minutes voici déjà deux ans...
Nous remontons ensuite la vallée pour visiter à quelques km seulement l'autre site majeur des gorges de l'Orbieu : la résurgence de Montjoi. Un impressionnant fracas nous y attend. Ici la crue ne semble atteindre son maximum que depuis ce matin du 16 (voir comparatif de photos). De nouveau l'imaginaire s'évade en songeant aux endroits que traversent cette rivière de 5m3/sec dans le massif, d'autant plus que nous savons à présent grâce au traçage récent qu'une bonne partie de ce trajet se fait probablement en écoulement libre.
Une zone noyée "tampon" prouve cependant ici son existence car un retard de déclenchement d'une quinzaine d'heures a pu être constaté par rapport à Vignevieille juste en face.
niveau d'eau le 15/03 après midi
niveau d'eau le 16/03 vers 11h
Peu de trous connus sur la montagne, pourtant, ça dépote en dessous (1500l/sec au bas mot car plusieurs sorties d'eau complètent la principale). Ce massif est situé à la charnière des bassins versants Orbieu-Agly, car la serre de Bouchard s'ennoie vers le sud sous les calcaires Cénomaniens. La ligne de partage des eaux en plein karst est imprécise.
Le "trou", 10m au dessus de la source, par lequel les plongeurs atteignent habituellement le siphon, est devenu une marmite bouillonnante
Nous reprenons la voiture pour monter vers les sources de l'Orbieu, en particulier la source de la tour, qu'Henri ne connaît pas. Nous sommes ici sous un des points culminants des Corbières, la serre de Bouchard cuminant à 931m. Le massif, très arrosé, est constitué de calcaires blancs Urgoniens
Peu de trous connus sur la montagne, pourtant, ça dépote en dessous (1500l/sec au bas mot car plusieurs sorties d'eau complètent la principale). Ce massif est situé à la charnière des bassins versants Orbieu-Agly, car la serre de Bouchard s'ennoie vers le sud sous les calcaires Cénomaniens. La ligne de partage des eaux en plein karst est imprécise.
Nous montons ensuite sur le massif par la piste du col de la Fage et passons côté sud. Petit arrêt au trou de la Pause pour constater que le courant d'air est toujours présent malgré les tonnes d'eau qu'il y a sous terre. Descente ensuite vers la source de l'Agly pour relever les repères placés près du torrent la veille dans un but de surveillance d'une montée d' eau potentielle .
Si le débit a diminué en cette mi-journée, la crue dans la nuit a été terrible, plus que sur l'Orbieu: les berges sont rabotées prouvant que ça fait bien longtemps qu'un tel niveau n'avait été atteint. Estimation probablement frileuse à 7m3/sec ! Mes repères étaient placés bien trop bas.
Sous la source, plusieurs sorties d'eau en pression provenant probablement de la dalle cénomanienne sous jacente rajoutent pas mal de débit.
Nous finissons notre périple par un dernier site bien connu : le gourg de l'Antre. La veille au soir le phénomène était exceptionnel : un lac avec un geyser au centre occupait la place. Aujourd'hui le constat est éloquent : la rivière a (presque) regagné sa place normale, mais dans la nuit le flot a débordé de la doline !
Du sable partout sur les bords jusqu'en haut (8m au dessus du cours normal), des galets de différentes provenances géologiques plaqués sur les parois du gouffre; jamais rien vu de pareil en 20 ans d'observations. Le caractère rarissime de cette crue est confirmé, les pluies sur le versant sud ont été énormes.
Le débit atteint dans la nuit est difficile à estimer mais dépasse vraisemblablement les 10 m3/sec. Là aussi, la structure du siphon amont est certainement modifiée, ça vaudra le coup de replonger.
Le phénomène constaté implique donc que l'amont du gourg recèle un réseau vraiment très important et plus large que l'aval.
Renseignements pris, la station de jaugeage préfectorale du bas Agly a enregistré un pic de crue dans la nuit à 1100 m3/sec, 200 de plus que le débit de la Loire à son embouchure...
C'est à peine inférieur à la crue de référence de septembre 92 qui avait fauché plusieurs vies et cela confirme ce que nous avons constaté aujourd'hui sur le bassin.
La journée s'achève sur un double sentiment, à la fois de fascination face à cette nature déchaînée et à ces grands réseaux pour la plupart encore inconnus qui vivent si intensément ces jours ci; et à la fois de frustration car nous savons qu'il nous sera impossible de lever toutes ces grandes énigmes de notre vivant.
5 commentaires:
Férocement grandiose.....
Merci de nous faire partager cette course poursuite de l'eau souterraine des corbières.
Pour sur le fond du gourg de l'antre amont va être revisité.
Bel enjeu !
Après avoir vu ça, c'est sûr qu'il y a du lourd à trouver.
Il y a la place pour, et la pente...
Mais c'est bien beau tous ces raisonnements,mais elles sont où les premières?????
Patience ! Ca va venir mais tu sais aussi bien que nous que ça gagne pas à tous les coups et qu'il faut en vouloir un max et y consacrer beaucoup de temps.
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